Renaud DOGIMONT
« Hôpital hors des murs » : allier efficience et progrès social
Attente interminable aux urgences, retour au domicile mal préparé, rupture dans le parcours de soins, recours aux soins trop tardif sont autant de symptômes du mal qui ronge l’organisation hospitalière. Centré sur le curatif, l’hôpital d’aujourd’hui mène une course effrénée à la production d’actes et à la réduction de ses taux de fuite. Il se focalise sur ses missions d’expertise scientifique et technique et délaisse en général le champ de la prévention, délégué au milieu associatif qui manque de moyens et qui peine à sensibiliser les populations les plus précaires renonçant à se soigner.
A l’ère des Groupements Hospitaliers de Territoires, l’hôpital cherche à renforcer ses coopérations dans une logique d’efficacité économique mais il se tourne exclusivement vers les structures homologues, négligeant trop souvent les professionnels de santé de ville qui interviennent pourtant en amont et en aval de l’hospitalisation. Pour en finir avec les passages aux urgences évitables, les parcours de soins désorganisés et les inégalités sociales en santé, qui alimentent le coût inflationniste de notre système de santé, l’hôpital doit engager un véritable changement de paradigme.
Il doit rompre avec l’hospitalo-centrisme et dépasser le clivage idéologique traditionnel qui l’oppose à la ville. Pour réussir, l’hôpital doit s’ouvrir vers la ville et se rendre dans les quartiers. C’est le concept d’ « Hôpital hors des murs ». Il se fonde sur deux piliers. Le premier consiste à développer les canaux de communication entre les professionnels de santé de ville et ceux de l’hôpital afin de faciliter les parcours de santé et de les rendre plus cohérents. L’ambition ultime est de parvenir à fédérer une communauté de professionnels de santé sur l’ensemble du territoire.
Le second pilier est de considérer le préventif comme la clé d’une baisse durable et soutenable des dépenses en santé. Il faut porter un nouveau modèle de développement où l’indicateur de performance est la capacité à faciliter l’accès aux soins pour les populations les plus vulnérables, jusqu’alors des laissés pour compte. Grâce à l’intelligence collective, le Centre Hospitalier de Douai mène depuis deux ans, sur son territoire, une stratégie de décloisonnement originale qui fédère professionnels de santé hospitaliers et libéraux, représentants des URPS, élus et acteurs du monde associatif.
Ce sont ainsi des avancées significatives, qui ont pu être obtenues à brèves échéances et qui seront déclinées dans le reportage consacré dans ce numéro. Mais au-delà de l’impératif d’efficience, ce projet se veut résolument humaniste. C’est un esprit de confraternité renforcé, reposant sur la confiance et le respect mutuel, qui anime désormais nos relations ville-hôpital. A l’échelle de nos concitoyens, nous oeuvrons modestement à faire de l’égalité d’accès aux soins une réalité.
Renaud DOGIMONT
Directeur général du Centre Hospitalier de Douai
